1. Le chant grégorien

De Lamentations de Jérémie.

Lors des matines du Triduum Sacrum, les trois premières leçons sont réservées aux Lamentations de Jérémie. Lorsqu'elles sont chantées en grégorien, c'est le 6e mode (mode de fa plagal) qui est généralement utilisé dans une mélodie simple comme celle-ci :



qui est une formule psalmodique reprise dans l'édition bénédictine de Solesmes, formule qui s'éloigne du récitatif liturgique pour rejoindre la psalmodie appelé ainsi bien que les lamentations ne soient pas des psaumes.#1

On pense que les lamentations ont fait l'objet d'une psalmodie de type direct, c'est-à-dire sans texte additionnel entre les versets, ou d'une psalmodie de type antiphonaire en alternant le chant des versets sur deux chœurs. On a peu de renseignements sur ce sujet et les seuls que nous possédions concernent principalement l'intervention de chantres ou d'enfants de chœur solistes.

On trouve toujours dans les différentes versions du chant grégorien, depuis sa notation en neumes, une structure identique qui permet de marquer plusieurs cadences :

  • tout d'abord l'intonatio (A) permet la transition vers la note de récitation du ton ;
  • ensuite, la récitation (B) elle-même appelé tenor ou corde de récitation ; on la retrouve ensuite après la mediatio ;
  • lorsque la récitation est trop longue, ou fait l'objet d'une ponctuation textuelle particulière (virgule par exemple), une flexa (C) vient reposer le chant pour ensuite continuer, après une respiration, la récitation ; il n'y a généralement pas de flexa après la mediatio ;
  • la mediatio (D) est une cadence médiane qui se situe généralement au milieu d'un verset ;
  • la terminatio (E) correspond à la cadence finale dont la dernière note donne le ton psalmodique.

Mais l'enrichissement de la polyphonie et la multiplication des cadences vont diluer l'univers des tons liturgiques au XVe et XVIe siècles. La notation elle-même évolue.

Le ton solennel utilisé pour la récitation ou le chant ne doit pas faire oublier le traitement du texte (en latin, rappelons-le) ; il faut assurer un certain débit des paroles chantées ou non dont le prononcé peut être différent suivant les régions françaises voire les pays. C'est la raison pour laquelle, en plus de l'évolution de la notation musicale, le texte fait l'objet d'un traitement particulier. On utilise à cet effet trois accents typographiques ( ´ ; ` ; ^ ) pour gérer le débit accentuel et éviter la monotonie de la récitation.

Mais quel est le métronome auquel obéissent naturellement ou pas les chanteurs ? Avec quelques siècles de décalage, on est en droit de penser, selon des travaux réalisés par l'école bénédictine, que le rythme devait suivre celui du langage : Accentus seminarium musices, dit Martianus Capella (auteur latin du Ve siècle, Les Noces de Mercure et de Philologie).




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1. On remarquera la périélèse sur la finale de Prophetae : au lieu de finir sur sol fa mi fa, l'introductio s'achève avec trois notes supplémentaires : sol fa mi fa sol sol fa, formule de cadence qu'utilisaient les chantres et qui consiste à précéder de plusieurs notes supérieures ou inférieures, la note finale.
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