La querelle des doyens de la cathédrale de Senlis

De Lamentations de Jérémie.

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En s'adressant au nouveau doyen Mr de Bragelongne, l'ancien doyen Mr Jean Deslyons fait appel à l'opinion publique de ce qu'il vient d'apprendre ''que l'on y preparoit un spectacle de Musique extraordinaire pour le Tenebres, qui sont proprement les Funerailles & le duëil de nôtre Maître. A quoi pensez-vous Monsieur mon tres-cher Confrere'' [...] ''qui sçavez que selon les Ecritures, la Musique dans le duëil est impertinente & importune, ''Musica in luctu importuna narratio'' [Ecli.c.22.v.6.]. Quand je suis venu au Doyenné, on ne chantoit point les Leçons de Jérémie musicalement ; & ce fut le sieur Cosset qui en introduisit la nouveauté. Cependant on leur donne le nom de Lamentations : & Belethus<sup>[[#27]]</sup> ancien Docteur de Paris de cinq à six cens ans, marque en termes exprés dans son Traité des Offices Divins, qu'elles doivent être recitées dans un chant lugubre, & d'un ton triste, capable de tirer les larmes des yeux.'' [...] ''Or il ne se contente pas de dire souvent que l'Office des Ténebres doit être celebré ''lamentabiliter'' : Mais j'ai été surpris de la remarque qu'il fait que l'Office des Matines durant ces trois nuits, se chantoit d'une voix ''alta & quasi terribili'', jusques à repeter par 2. & 3. fois en dix & douze lignes les mêmes mots, ou du moins le même sens, ''Voce elevatá & velut horribili... tribus hisce noctibus ipsum Officium alta voce & quasi terribili''. Accordez cela si vous pouvez avec vôtre Simphonie de Viole, de Violons, d'Orgues & de Clavessiin. Rien n'est plus contraire ni au tems de Carême où l'on fait cesser les Orgues, ni à la Semaine-Sainte & à l'Office des Tenebres, où l'harmonie des Cloches est interdite, quoique ce soit les veritables instrumens benits & consacrez par l'Eglise même pour mettre les Fideles en devotion : au lieu que les Violes & les Violons avec les autres Instrumens que vous preparez, sont veritablement prophanes, emploïez d'ordinaire aux danses, aux spectacles du Theatre, & aux pompes de Satan''.
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En s'adressant au nouveau doyen Mr de Bragelongne, l'ancien doyen Mr Jean Deslyons fait appel à l'opinion publique de ce qu'il vient d'apprendre ''que l'on y preparoit un spectacle de Musique extraordinaire pour le Tenebres, qui sont proprement les Funerailles & le duëil de nôtre Maître. A quoi pensez-vous Monsieur mon tres-cher Confrere'' [...] ''qui sçavez que selon les Ecritures, la Musique dans le duëil est impertinente & importune, ''Musica in luctu importuna narratio'' [Ecli.c.22.v.6.]. Quand je suis venu au Doyenné, on ne chantoit point les Leçons de Jérémie musicalement ; & ce fut le sieur Cosset qui en introduisit la nouveauté. Cependant on leur donne le nom de Lamentations : & Belethus ancien Docteur de Paris de cinq à six cens ans, marque en termes exprés dans son Traité des Offices Divins, qu'elles doivent être recitées dans un chant lugubre, & d'un ton triste, capable de tirer les larmes des yeux.'' [...] ''Or il ne se contente pas de dire souvent que l'Office des Ténebres doit être celebré ''lamentabiliter'' : Mais j'ai été surpris de la remarque qu'il fait que l'Office des Matines durant ces trois nuits, se chantoit d'une voix ''alta & quasi terribili'', jusques à repeter par 2. & 3. fois en dix & douze lignes les mêmes mots, ou du moins le même sens, ''Voce elevatá & velut horribili... tribus hisce noctibus ipsum Officium alta voce & quasi terribili''. Accordez cela si vous pouvez avec vôtre Simphonie de Viole, de Violons, d'Orgues & de Clavessiin. Rien n'est plus contraire ni au tems de Carême où l'on fait cesser les Orgues, ni à la Semaine-Sainte & à l'Office des Tenebres, où l'harmonie des Cloches est interdite, quoique ce soit les veritables instrumens benits & consacrez par l'Eglise même pour mettre les Fideles en devotion : au lieu que les Violes & les Violons avec les autres Instrumens que vous preparez, sont veritablement prophanes, emploïez d'ordinaire aux danses, aux spectacles du Theatre, & aux pompes de Satan''.
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:<span style="color:#808080;"><span id="27">'''27'''. ''NDR : Beleth, Jean (fl. 1135–1182), écrivain ecclésiastique''</span>

Version actuelle en date du 23 juillet 2010 à 09:25

En s'adressant au nouveau doyen Mr de Bragelongne, l'ancien doyen Mr Jean Deslyons fait appel à l'opinion publique de ce qu'il vient d'apprendre que l'on y preparoit un spectacle de Musique extraordinaire pour le Tenebres, qui sont proprement les Funerailles & le duëil de nôtre Maître. A quoi pensez-vous Monsieur mon tres-cher Confrere [...] qui sçavez que selon les Ecritures, la Musique dans le duëil est impertinente & importune, Musica in luctu importuna narratio [Ecli.c.22.v.6.]. Quand je suis venu au Doyenné, on ne chantoit point les Leçons de Jérémie musicalement ; & ce fut le sieur Cosset qui en introduisit la nouveauté. Cependant on leur donne le nom de Lamentations : & Belethus#27 ancien Docteur de Paris de cinq à six cens ans, marque en termes exprés dans son Traité des Offices Divins, qu'elles doivent être recitées dans un chant lugubre, & d'un ton triste, capable de tirer les larmes des yeux. [...] Or il ne se contente pas de dire souvent que l'Office des Ténebres doit être celebré lamentabiliter : Mais j'ai été surpris de la remarque qu'il fait que l'Office des Matines durant ces trois nuits, se chantoit d'une voix alta & quasi terribili, jusques à repeter par 2. & 3. fois en dix & douze lignes les mêmes mots, ou du moins le même sens, Voce elevatá & velut horribili... tribus hisce noctibus ipsum Officium alta voce & quasi terribili. Accordez cela si vous pouvez avec vôtre Simphonie de Viole, de Violons, d'Orgues & de Clavessiin. Rien n'est plus contraire ni au tems de Carême où l'on fait cesser les Orgues, ni à la Semaine-Sainte & à l'Office des Tenebres, où l'harmonie des Cloches est interdite, quoique ce soit les veritables instrumens benits & consacrez par l'Eglise même pour mettre les Fideles en devotion : au lieu que les Violes & les Violons avec les autres Instrumens que vous preparez, sont veritablement prophanes, emploïez d'ordinaire aux danses, aux spectacles du Theatre, & aux pompes de Satan.


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27. NDR : Beleth, Jean (fl. 1135–1182), écrivain ecclésiastique
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